On a assisté la semaine dernière à un concert d'éloges
envers la journaliste et autrice, Denise Bombardier, qui est décédée d'un
cancer fulgurant à l'âge de 81 ans. La dame, il est vrai, ne passait pas
inaperçue. De toutes les personnalités que le Québec ait connues, madame Denise
Bombardier était l'une de ses plus grandes figures intellectuelles. Le moins
que l'on puisse dire c'est qu'elle avait un sacré bagout. Pour elle, la parole
et les mots constituaient ses meilleures armes et elle ne craignait pas le
débat. Les vrais débats. Ces moments où les idées s'entrechoquent et
s'affrontent autour d'idées claires et exprimées sans chercher à se faire
mouton devant les lieux communs des idées bien reçues des têtes bien-pensantes.
Madame Denise Bombardier était un être unique et sa disparition de notre
paysage médiatique et littéraire mérite bien ces mots de cette chronique
d'aujourd'hui.
Denise Bombardier, une femme unique
Denise Bombardier est effectivement une femme d'exception.
Née le 22 janvier 1941 à Montréal, au Québec, Denise Bombardier est une
autrice, journaliste, animatrice de télévision et chroniqueuse québécoise. Elle
est connue pour sa carrière prolifique et son engagement dans le domaine des
médias.
Denise Bombardier a commencé sa carrière en
journalisme à un jeune âge. Elle a travaillé pour plusieurs journaux, dont Le
Devoir, avant de se lancer dans l'écriture de livres et de devenir une
chroniqueuse très respectée. Ses écrits portent sur une variété de sujets,
notamment la société, la politique, la culture et les droits des femmes.
Au fil des années, Denise Bombardier s'est imposée
comme une figure influente au Québec et au-delà. Elle a animé plusieurs
émissions de télévision à succès, dont Les femmes en marge et Bombardier
où elle abordait des sujets de société importants. Son franc-parler et sa
capacité à traiter de questions controversées ont fait d'elle une personnalité
publique incontournable.
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Denise Bombardier a également été une voix forte
pour la défense des droits des femmes. Elle a milité pour l'égalité des sexes
et a dénoncé les injustices et les discriminations dont les femmes sont
victimes. Son engagement dans ce domaine a contribué à faire avancer le débat
sur les questions de genre au Québec.
En reconnaissance de ses contributions
exceptionnelles, Denise Bombardier a reçu de nombreux prix et distinctions tout
au long de sa carrière. Elle est membre de l'Ordre du Canada et de l'Ordre
national du Québec, entre autres honneurs.
Denise Bombardier est une femme qui a marqué le
paysage médiatique québécois et qui continue à susciter le débat avec ses
prises de position audacieuses. Son parcours et son influence font d'elle une
femme d'exception.
Une autobiographie courageuse
Celles et ceux qui veulent mieux connaître madame
Bombardier peuvent y avoir accès avec ses propres mots. Femme de combats et d'engagements, Denise Bombardier n'a jamais eu peur
des polémiques et le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle n'avait pas la
langue de bois. Dans son autobiographie publiée aux Éditions Plon à Paris en
2018, Denise Bombardier raconte sa vie et règle ses comptes avec un réalisateur
de Radio-Canada connu lors de son adolescence, dénonce les comportements
inappropriés et déplacés de son co-animateur vedette, aujourd'hui à la retraite
et raconte son parcours professionnel exceptionnel. Au passage, elle nous livre
ses confidences sur sa relation de haine avec son père, l'alcoolisme de ses
parents et ses aventures sentimentales et amoureuses. Un livre coup de poing qui
ressemble bien à son autrice. Un livre à lire absolument si vous vous
intéressez à cette femme peu commune du Québec.
Denise Bombardier a fréquenté et connu tous les personnages importants du
Québec au 20e siècle. Elle a écrit sur Céline Dion, eu une vie amoureuse
tumultueuse et connu tous les grands personnages politiques de l'époque tels
Pierre Bourgault, René Lévesque, Pierre Elliott Trudeau et de nombreux autres.
Elle fut membre du Parti libéral du Québec et membre active d'une cellule
étudiante du Rassemblement pour l'indépendance nationale. La politique animait
sa vie. Cela l'a menée au journalisme et aux entrevues qui l'ont fait
avantageusement connaître d'un large public.
Elle fut aussi une amante de la France de nos ancêtres et elle n'a jamais
vu fléchir son amour pour le Québec.
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Française,
bien que québécoise et lucide
Elle a vécu à
Paris. Elle aimait profondément la France : « Durant mes trois années à Paris, Claude et moi
avons parcouru toutes les régions, avides de nous perdre dans leurs beautés
secrètes, de découvrir les sites classés où chaque pierre raconte une histoire,
où chaque lopin a été foulé par l'homme. Au Québec comme dans le reste du
Canada, nombre de territoires sont vierges et uniquement déchiffrables par les
géographes et les archéologues, habitués à faire parler les pierres, les
montagnes et les millions de lacs (non recensés), mais en France tout reste à
dimension humaine. Traverser ce pays de mon cœur est rassurant, car on a
l'impression de mettre ses pas dans ceux des habitants des siècles, voire des
millénaires précédents. La nature ne semble jamais sauvage. Lorsque je me
promène dans des forêts françaises, j'ai toujours le sentiment qu'elles ont été
balayées et aménagées par la main de l'homme. Dans le nord du Québec et du
Canada, sur des territoires peuplés d'à peine quelques centaines de milliers
d'autochtones très isolés les uns des autres, on se sent disparaître. » (Denise Bombardier, Une vie sans peur et sans regret, Paris, Éditions
Plon, 2018, 480 p.)
Outre son grand amour pour le
Québec et la France, madame Bombardier qui appartenait aux deux mondes comme
nul autre, se démarquait par sa très grande lucidité et son regard critique sur
le monde et sur le Québec. Elle a souvent été blessée. Bref, Denise Bombardier
était une sorte d'écorchée de la vie, une grande sensible. Elle savait mieux
que quiconque que nul n'est prophète en son pays.
Elle éprouvait de la nostalgie
pour une certaine télévision où il y avait place à la discussion entre
intellectuels comme en France : « Il est vrai que c'était une époque
où l'on pouvait - encore - accueillir longuement des intellectuels et des
artistes de haut niveau, auxquels on accordait une importance définie par le
temps d'antenne. Avec Raymond Aron, comme avec Jean-François Revel, le premier
ministre Michel Rocard, ou les écrivains Marguerite Yourcenar, Marguerite
Duras, Georges Simenon, Albert Cohen, Anne Hébert et tant d'autres, les
entretiens duraient au minimum une demi-heure, voire une heure avec une courte
pause. En ces temps lointains, nous avions de la télévision une conception
pédagogique à destination d'un large public, vision impensable et impossible
aujourd'hui, à l'époque de l'instantanéité et du divertissement à tout prix.
"Autres temps, autres mœurs." Et la nostalgie n'est d'aucun secours. » (Ibid.)
Une grande dame qui laissera un grand vide
Pour
moi, madame Denise Bombardier était une louve qui prenait soin de ses petits,
le Québec et la France. Même si les loups semblent être des animaux froids et
agressifs, il s'agit d'animaux très rusés et familiers. Chez le loup, comme
d'autres espèces animales sauvages, il existe le cas du mâle alpha, qui est
généralement le seul à se reproduire avec la femelle bêta afin de créer une
meute avec sa propre progéniture. Au-delà de son privilège de s'accoupler, le
mâle alpha a aussi de grands instincts familiaux,
puisqu'il prend soin des petits, participe à la recherche de nourriture pour la
survie de la meute et protège tous les siens.
Denise
Bombardier a toujours fait preuve d'une grande indépendance d'esprit. On
l'aimait où on la détestait, mais personne n'était indifférent à cette femme.
Malgré ses dehors prétentieux, elle était une Québécoise fière et entière qui
protégeait les siens. Elle n'a jamais craint de décrier les dérives qu'elle
notait parmi nous comme ces derniers temps la culture woke. Elle détestait plus
que tous les arguments convenus et les têtes bien-pensantes conformistes. Pour
moi, madame Denise Bombardier est en quelque sorte une louve alpha. Sincères
condoléances à sa famille et amis.