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La fin des nomades

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 5 juillet 2023      

J'ai passé toute mon enfance et une grande partie de mon adolescence à Montréal. Ma famille était la seule qui vivait dans la grande ville dans la parenté du côté de ma mère alors que du côté de mon père, il y avait un frère et deux sœurs sur 16 enfants qui vivaient à Montréal où Longueuil. Ce qui fait que ma famille était un peu unique dans la parentèle. D'ailleurs, nous étions suspects de vivre dans la grande ville avec tous les sous-entendus que cela pouvait engendrer à l'époque. Mes tantes disaient que je vivais dans la ville du péché. Ce n'est pas d'hier que Montréal soit différente du reste du Québec. Mon souvenir le plus fugace de l'époque c'est que nous étions de vrais nomades. Chaque mois de mai, nous déménagions, souvent dans une rue à côté, dans le même quartier. Ce n'est qu'au milieu des années 1970 que la date du déménagement est devenue le 1er juillet. En effet, jusqu'au milieu des années 1970, les baux locatifs expiraient le 30 avril et les ménages quittaient leur logement le 1er mai. Afin d'éviter de perturber l'année scolaire, le gouvernement du Québec vote une loi en 1974. Celle-ci décrète que les baux doivent désormais se terminer le 30 juin.

D'ailleurs, le déménagement annuel était la caractéristique principale de Montréal. La tradition de déménager à date fixe remonte à l'après-guerre, alors que le Québec connaît une grave pénurie de logements. Afin de protéger les locataires contre des évictions hivernales, l'Église catholique fait pression pour interdire les déménagements avant le mois de mai. Ce n'est pas exagéré que de dire que c'était là une caractéristique unique au Québec et tout particulièrement à Montréal. Ce n'est qu'au Québec que l'on observe ce phénomène social unique. Si bien qu'en 1998, une équipe de la BBC se déplace à Montréal pour analyser cette grande migration. Aujourd'hui, la pénurie de logements et le coût prohibitif de ceux-ci viennent heurter de front cette tradition de migration des locataires. Nous sommes vraiment en pleine crise du logement. Cela mérite quelques commentaires et une réflexion.

La crise du logement au Québec

Au Québec, quoi que puisse en dire le gouvernement Legault, nous vivons une grave crise du logement. Il faut savoir gré à Gabriel Nadeau Dubois et à Québec solidaire de nous alerter sur cette question depuis plusieurs années. Notre député de Sherbrooke, représentante de Québec solidaire, Christine Labrie, ne manque pas une occasion pour nous rappeler cette réalité qui touche aussi de plein front la ville de Sherbrooke et la région de l'Estrie. Pas étonnant qu'elle ait mené le combat contre la vente immorale du complexe Faubourg Mena'sen.

La crise du logement au Québec en 2023 est une situation où l'offre de logements disponibles est insuffisante pour répondre à la demande croissante. Cette crise se caractérise par une augmentation du prix des loyers, une pénurie de logements abordables et une augmentation du nombre de personnes sans abri.

Plusieurs facteurs peuvent contribuer à cette crise du logement. Parmi ceux-ci, on trouve la croissance démographique, l'urbanisation, le manque de construction de nouveaux logements, la spéculation immobilière, les politiques gouvernementales et les difficultés économiques.

La croissance démographique continue d'augmenter la demande de logements, en particulier dans les grandes villes comme Montréal, Québec et même Sherbrooke. L'urbanisation rapide a également un impact, car de plus en plus de personnes cherchent à vivre près des centres urbains pour des raisons d'emploi, d'éducation et de services à proximité.

Le manque de construction de nouveaux logements est un facteur clé de la crise. Bien que des projets de construction soient en cours, ils ne suffisent pas à combler le déficit existant. De plus, les logements abordables sont souvent insuffisants, car la plupart des nouveaux développements immobiliers se concentrent sur des logements de luxe ou des condominiums plus chers.

La spéculation immobilière joue également un rôle dans la crise. Certains investisseurs achètent des propriétés dans le but de les revendre à un prix plus élevé, ce qui entraîne une hausse des prix sur le marché immobilier. Cela rend les logements encore moins abordables pour de nombreux résidants. Il y a aussi le phénomène des Airbnb qui ampute le parc de logements disponibles à la population.

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Les politiques gouvernementales peuvent également avoir un impact sur la crise du logement. Bien que le gouvernement du Québec ait mis en place des mesures pour encourager la construction de logements abordables, il existe toujours un décalage entre l'offre et la demande. De plus, on doit admettre que les politiques mises en place sont inefficaces pour résoudre le problème à court terme.

Enfin, les difficultés économiques peuvent aggraver la crise du logement. L'instabilité économique, le chômage et les revenus stagnants rendent plus difficile pour de nombreuses personnes de trouver et de maintenir un logement abordable. Nous devons mettre la main à la pâte pour trouver une solution durable à cette grave crise sociale et cela passe par la mise en commun des efforts de toutes les parties prenantes.

Des solutions possibles...

Dans un communiqué de presse émis le 9 mai dernier, L'Union des municipalités du Québec (UMQ) affirme que : « Alors que la crise du logement ne cesse de s'aggraver partout au Québec, et que le 1er juillet arrive à grands pas, il est inconcevable de maintenir le statu quo. Il est urgent de se mettre en mode résultat avec les acteurs du milieu et le gouvernement du Québec. Les élues et élus municipaux sont engagés plus que jamais. Il faut être à l'écoute des réalités du terrain. Par exemple, en s'attaquant plus sérieusement à l'application de la Loi sur l'hébergement touristique, comme le demande l'UMQ depuis 2020, ce sont des milliers de logements de type Airbnb qui auraient pu être remis sur le marché de l'habitation beaucoup plus tôt », a déclaré monsieur Guillaume Tremblay, deuxième vice-président de l'UMQ, président du Comité sur l'habitation de l'Union et maire de Mascouche. Plus récemment, au terme de sa tournée des villes, le nouveau président élu en mai dernier, Martin Damphousse a déclaré à Sherbrooke : « Soyons francs, je viens de Varennes dans la communauté métropolitaine de Montréal. L'enjeu des mines, je le maîtrise moins. L'enjeu des forêts. L'enjeu du transport aérien régional. Mais ce qui était clair à travers l'ensemble des rencontres, c'est qu'il y a plusieurs sujets qui font l'unanimité. » Le président note la crise du logement, les changements climatiques, la rareté de la main-d'œuvre et le transport collectif en tant qu'enjeux qui sont revenus « partout » dans ses discussions. La mairesse de Sherbrooke Évelyne Beaudin a quant à elle déclarée que : « Pour pouvoir surmonter des crises aussi importantes, ça demande nécessairement un alignement de tous les paliers. Que ce soit pour le logement, la crise climatique ou la main-d'œuvre, on ne pourra pas faire face à ces défis-là en essayant de travailler chacun dans son coin. »

En 2023, la crise du logement au Québec peut être abordée par différentes solutions. Voici quelques mesures qui pourraient être mises en place pour faire face à cette problématique. Il faut plus de construction de logements. Il est nécessaire de promouvoir la construction de nouveaux logements abordables pour répondre à la demande croissante. Cela peut être réalisé en encourageant les promoteurs immobiliers à investir dans des projets de logements abordables, en offrant des subventions ou des incitatifs fiscaux. Cela suppose aussi un meilleur accueil des villes aux promoteurs, ce qui n'est pas nécessairement gagné d'avance à Sherbrooke.

Il importe aussi de réaménager les logements vacants. Il existe de nombreux logements vacants à travers la province. En encourageant les propriétaires à rénover et à louer ces logements inoccupés, on peut augmenter l'offre de logements disponibles. Il faut aussi revoir la réglementation du marché de la location. La mise en place de règles et de réglementations pour encadrer le marché de la location peut contribuer à protéger les locataires et à stabiliser les loyers. Des mesures comme le gel des loyers, l'encadrement des hausses de loyer avec un registre de loyers par exemple et l'amélioration des normes de logement peuvent être envisagées.

Il faut promouvoir avec plus de vigueur le logement coopératif. À Sherbrooke, nous avons une longueur d'avance sur plusieurs villes au Québec. Ce qui ne signifie pas qu'il ne faut pas intensifier nos actions en ce domaine. Les coopératives d'habitation sont une solution intéressante pour fournir des logements abordables. En encourageant leur développement et en offrant un soutien financier et technique aux coopératives, on peut favoriser l'accès à un logement stable et abordable.

Les gouvernements doivent aussi investir massivement dans les logements sociaux : l'augmentation du financement des logements sociaux est essentielle pour répondre aux besoins des personnes à faible revenu. En développant davantage de logements sociaux et en soutenant les programmes de logement existants, on peut aider les personnes vulnérables à trouver un logement sûr et abordable.

L'aménagement des milieux de vie compte aussi pour beaucoup dans les solutions. Ainsi, l'amélioration du transport en commun vient au premier rang. L'accès à des options de transport en commun efficaces peut permettre aux personnes de vivre en dehors des zones urbaines denses, où les loyers sont souvent plus élevés. En investissant dans l'expansion et l'amélioration du réseau de transport en commun, on peut ouvrir de nouvelles possibilités de logement abordable en périphérie des grandes villes.

Il faut aussi que les villes se mettent à une planification urbaine durable : une planification urbaine efficace et durable peut contribuer à la création de quartiers résidentiels bien conçus, où les logements sont facilement accessibles aux services et aux emplois. En encourageant la densification intelligente et en favorisant les aménagements mixtes, on peut créer des communautés dynamiques et abordables.

Bien sûr, il est important de noter que ces solutions ne sont pas exhaustives et qu'une approche intégrée et multidimensionnelle est nécessaire pour faire face à la crise du logement. Les gouvernements, les organismes de logement et la société civile doivent collaborer pour trouver des solutions durables et adaptées aux besoins spécifiques des différentes régions du Québec. Chose certaine, si on ne se grouille pas le cul, on risque de voir la fin d'une grande tradition toute québécoise, celui de la bougeotte annuelle. Ce sera la fin des nomades...



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