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Allez voter…

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 28 septembre 2022      

La dernière semaine de la campagne électorale a donné lieu à peu de nouveautés de la part des différents partis en présence. Le fait marquant de cette dernière semaine est le débat des chefs sur les ondes d'ICI Radio-Canada et l'apparition des chefs à la grande messe de Guy A. Lepage à l'émission Tout le monde en parle. Il faut noter que le débat des chefs animés jeudi soir dernier avec brio par le journaliste et chef d'antenne Patrice Roy a été un grand moment de télévision en politique. Ce débat s'est fait dans le respect et sans la cacophonie que l'on a constatée au Face à Face de TVA. Jeudi soir dernier, le gagnant du débat a été la démocratie québécoise. Quant à Tout le monde en parle, j'ai une profonde réserve avec cette confusion entre informations, débats, variétés et d'effets publicitaires. Si la formule du Face à Face de TVA était une manufacture de clips, celle de Tout le monde en parle en est un d'effet de toge avec pour toile de fond le style sermon sur la montagne.

Quoi qu'il en soit, dans moins de cinq jours, nous devrons aller voter, nonobstant celles et ceux qui l'ont déjà fait dans le cadre du vote par anticipation. Après une campagne électorale intéressante et chaudement disputée, c'est le temps des choix. Réflexions libres sur les options qui s'offrent à nous pour choisir qui gouvernera le Québec au cours des quatre prochaines années.

Les vrais enjeux

Malgré ce que l'on peut en dire, les vrais enjeux qui confrontent notre avenir ont été soulevés par les différents protagonistes de cette campagne électorale. En fait, quatre grands enjeux sont au cœur de nos choix d'avenir : la crise climatique et ses effets délétères sur notre vie quotidienne, la crise des inégalités sociales et économiques qui se traduit chez nous par des discours sur l'inflation, la crise du logement et la crise de l'identité qui se matérialise dans nos débats sur la langue, l'immigration, la laïcité de l'État et l'appartenance du Québec au grand ensemble canadien.

Ces enjeux, dans des colorations et des sensibilités différentes, sont tout au moins les mêmes partout ailleurs dans les démocraties occidentales. Pour bien en saisir l'origine et savoir nommer les choses afin de mieux nous y attaquer, il est nécessaire de se rappeler nos fondamentaux en sciences politiques, en sociologie, en histoire et en économie. Dans un essai paru en 2022, l'excellent politologue Gérard Boismenu rappelle avec une grande éloquence que : « Les dynamiques entre les acteurs sociaux et politiques sont enrayés, le modèle de développement engendre de grandes disparités, la cohésion sociale d'ensemble est plombée, les radicalités politiques font irruption et les extrêmes séduisent. On peut y voir autant de signes de société à bout de souffle. Viennent confirmer cette perception les signes de mal-être, le cynisme politique, une impression exacerbée d'injustice, l'affirmation que tout est pareil sur l'échiquier politique et le sentiment de perte et de déclassement que portent les classes moyennes et populaires. » Gérard Boismenu, Un monde désenchanté. Essai sur la crise sociale et politique, (Champs libres), Montréal, Les presses de l'Université de Montréal, 2022, p. 11

Un constat lucide et qui se déroule dans une arène théâtralisée et instrumentalisée par la féodalisation des médias et de l'opinion publique prisonnière de celles et de ceux qui font l'opinion. Ici aussi, Boismenu nous livre sa pensée que je partage totalement : « La façon dont on nomme les choses, dont on désigne les faits et dont on les pense, s'installe dans les luttes et oppositions idéologiques et politiques. La représentation c'est, d'une part, l'univers dans lequel les faits et les intérêts sont nommés et idéalisés, mais, d'autre part, c'est la sphère de la défense, de préconisation et de justification d'intérêts, dont l'habillage en idées et en principes et plus ou moins soigné. Par la formalisation du discours, les intérêts sont incarnés ou hiérarchisés, ce qui donne corps à des idéologies, qui deviennent elles-mêmes une arme de la lutte politique. » (Ibid. p. 17)

Ayant cela en tête, tentons de décrypter la campagne électorale que nous vivons en ce moment.

Reconfiguration politique du Québec

La société québécoise a beaucoup changé depuis les dernières années. Son poids démographique au Canada la condamne à une minorisation progressive et inéluctable et le vieillissement de la population fait des baby-boomers une force politique qui pèse encore lourdement sur cette société tant sur les coûts à venir des soins de santé que sur celui les choix politiques. Rien ne l'illustre mieux que les discours autour de la lutte aux changements climatiques dont Québec solidaire s'est fait le champion avec le Parti québécois. Sans être climatosceptique, on peut s'interroger sur la radicalité des mesures proposées par ces partis qui transformeraient nos modes de vie actuels. Taxer les autos solos, surtaxer le patrimoine de la classe moyenne, imposer de nouveaux modes d'habitation en bannissant les maisons individuelles ne passe pas inaperçu. Il y a un long travail de pédagogie à faire auprès de la population. En ce domaine, il importe que nous demeurions des démocrates et non pas que l'on cherche à imposer des solutions toutes faites à une population dubitative. On ne fait pas pousser des fleurs en tirant dessus.

On parle beaucoup des inégalités sociales et économiques. On importe le discours très convaincant de Thomas Piketty et auquel j'adhère sur la question du 1 % des plus riches. En cette matière, comme le discours sur le racisme importé des États-Unis, le Québec fait figure d'exception. Il y a beaucoup moins d'inégalités sociales et économiques au Québec qu'ailleurs au Canada et en Amérique du Nord. Au Québec, comme le disait le regretté Jean Lapierre, nous sommes pauvres en riches et riches en pauvres. C'est pourquoi les discours sur les injustices sociales et économiques doivent être calibrés avec notre réalité. Au Québec, nous vivons encore dans un mode d'État providence de type Keynesien que même la conservatrice Coalition avenir Québec s'est fait un devoir de maintenir au cours des quatre dernières années.

Quant à la crise de l'identité québécoise, le projet de pays ne semble pas avoir la faveur de la population et le Canada n'apparaît pas comme l'ennemi à abattre. Il est à mon sens évident que cette question devrait dans un jour très prochain être remise à l'ordre du jour. Les débats sur notre appartenance à la monarchie, la reconnaissance des droits des peuples autochtones, la collision inévitable entre les intérêts pétroliers du Canada et notre choix de l'énergie propre ne peuvent que favoriser la résurgence de ce débat sur l'avenir du Québec au sein du Canada. Cela devrait mener à un nouveau Canada ou à un nouveau pays, mais fatalement cela doit mener quelque part.

Choisir c'est un peu trahir...

Cette réflexion doit s'interrompre pour aller faire un choix électoral dans quelques jours. Un choix à la fois facile et difficile. J'ai trop de respect envers les lecteurs d'EstriePlus pour me lancer dans une argumentation pour dire aux autres pour qui voter. L'important c'est d'aller voter.

Concernant mes préférences personnelles, je dois vous dire d'abord que je suis d'avis que le gouvernement sortant a bien géré la pire crise sanitaire et je crois qu'il présente un plan de lutte aux changements climatiques qui peut être amélioré, mais qui tient la route. C'est pourquoi, mon choix à moi c'est de voter pour le gouvernement sortant même si j'ai de fortes réserves sur la Loi 21 ou une forme de nationalisme que je juge parfois étroit et que fondamentalement je me reconnais mieux dans le Parti libéral du Québec. Mais aujourd'hui, ce parti est prisonnier de son aile anglophone et il n'offre rien au Québec francophone quant à son avenir au sein du Canada. Je souhaite néanmoins la réélection de sa cheffe Dominique Anglade et je suis d'avis qu'elle mérite de demeurer la cheffe de son parti. Je souhaite aussi l'élection de députés du Parti québécois dans l'est du Québec. Le Québec doit garder dans son coffre à outils un parti qui prône la souveraineté du Québec et un plan de lutte aux changements climatiques qui respecte la capacité d'adaptation de la population. La souveraineté du Québec doit demeurer une avenue possible de notre avenir. Québec solidaire et son chef sont trop radicaux, trop intolérants envers celles et ceux qui ne pensent pas comme eux. Trop tasse-toi Baby-boomers. Il y a une différence entre la gauche et l'extrême gauche qui revêt des habits de respectabilité. Quant au Parti conservateur de monsieur Duhaime, il remet en cause le modèle québécois et cela m'apparaît peu opportun. Les conservateurs sont un épiphénomène des radios de Québec.

Quant à notre région, je suis d'avis que la députation sortante de la Coalition avenir Québec a fait un travail honnête au cours de leur dernier mandat et qu'elle mérite d'être reconduite. C'est pourquoi je serai heureux de voir réélus les députés-es François Jacques, Geneviève Hébert, André Bachand, Gilles Bélanger, François Bonnardel et Isabelle Charest.

Dans Sherbrooke, la députée sortante de Québec solidaire, Christine Labrie, a fait du bon travail, mais elle a été plus une militante qu'une députée. Elle est en porte à faux avec le monde économique. Jamais en quatre ans elle n'a cru bon de rencontrer la Chambre de commerce et d'industrie par exemple. Elle ne s'est jamais intéressée à nos entreprises manufacturières si ce n'est pour les vilipender, pas plus qu'elle n'a daigné porter attention au potentiel de notre zone d'innovation en physique quantique. Madame Labrie c'est une militante contre tout développement et qui veut rompre avec l'économie libérale de marché. C'est pourquoi dans Sherbrooke, il est temps de se retrouver à la table du conseil des ministres en votant pour une femme dévouée, expérimentée et dynamique. Une femme qui a adopté Sherbrooke et que Sherbrooke devrait adopter : madame Caroline St-Hilaire. Avec une telle somme d'expérience, avec le savoir-faire et la volonté de rassembler de Caroline St-Hilaire, Sherbrooke pourrait reprendre le chemin du succès tracé jadis par madame Monique Gagnon-Tremblay. C'est le pari que je fais.

Au-delà de mes préférences, l'important le 3 octobre prochain c'est d'aller voter.


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