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Être responsable ou payer… La rentrée parlementaire et la pandémie

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 23 septembre 2020      

Nos institutions démocratiques reprendront vie. Cela a été fait la semaine dernière au Québec et cela sera fait bientôt à Ottawa. En ce temps de pandémie, on ne comprend pas cet empressement à reprendre le combat politique. Certes, il est important que les oppositions se fassent entendre dans nos parlements pour critiquer nos gouvernements et les questionner sur leur choix. On a beau vivre un temps de crise sans précédent, cela ne suspend pas notre capacité à réfléchir, à exprimer nos accords et nos désaccords et surtout à chercher à obtenir une totale transparence de celles et de ceux qui gouvernent à nos destinées. Réflexion sur l'état de nos démocraties parlementaires en temps de pandémie.

Rien n'est comme avant...

Malgré nos efforts pour faire comme si nous n'étions pas en temps de pandémie, le retour à la normalité d'avant la pandémie n'est pas chose acquise. Loin de là ! Nous sommes dans une période de brouillard et nous ne savons pas ce que nous réserve l'avenir. Par exemple, le gouvernement de Justin Trudeau se prépare à déposer la semaine prochaine un nouveau discours du trône à Ottawa dans lequel il partagera avec les Canadiennes et les Canadiens ses intentions quant à l'avenir. On devrait y parler de plan de relance économique, d'orientations quant aux programmes de soutien aux revenus et de plan de relance vert. Cela est-il réaliste ? Sommes-nous en état de nous projeter dans l'avenir alors que nous sommes de plus en plus divisés sur les choses essentielles de la vie au quotidien ? Trop de consignes sanitaires disent les uns, pas assez disent les autres, climat de délation généralisée, montée des tenants d'un état sociosanitaire, effondrement du consensus du début de pandémie et montée des revendications corporatistes de divers groupes ancrés dans le Je Me Moi. Pas terrible comme climat politique, ne pensez-vous pas ?

La politique à tout prix

Devant cette situation, la classe politique réagit comme s'il était possible de faire semblant que nous vivons dans un monde avec une nouvelle normalité. Les conférences de presse se multiplient, les rencontres avec des groupes se poursuivent, les annonces d'investissements gouvernementaux pointent leur nez et les délibérations partisanes reprennent vie dans nos enceintes parlementaires. Cela est surréel. À preuve, dans la dernière semaine, les principaux chefs politiques de la scène fédérale des partis d'opposition, Erin O'Toole du parti conservateur et Yves-François Blanchet du Bloc québécois ont contracté le virus les obligeant à se mettre en quarantaine. Même le premier ministre Legault a dû faire une quarantaine provisoire le temps de passer un test de la COVID-19 qui heureusement s'est avéré négatif. Cela devrait donner un signal clair à la population et à notre classe politique que le virus est toujours parmi nous et il est vraisemblable qu'il fasse encore des centaines de victimes au pays. Alors, pourquoi cet acharnement des partis d'opposition à Ottawa à vouloir siéger en présentiel malgré les risques de propagation du virus. Mystère...

La population aussi vit au pays des licornes

Dans un tel contexte, il n'est guère étonnant que la population se sente moins concernée qu'au début de la pandémie par ce virus. Certes, la très vaste majorité de la population est consciente du danger que représente la COVID-19, mais elle a tendance à relâcher sa garde et à se permettre plus de latitude avec les consignes sanitaires. Après tout, ça fait six mois que ce virus nous a volé nos vies et il n'est que normal que nous soyons devenus un peu las d'entendre parler de pandémie, de cas et de décès.

Par ailleurs, les gouvernements ont beau répéter leurs messages, ils ne parviennent plus à nous convaincre aussi efficacement. Il est vrai que l'on note des incohérences dans le discours et que les règles sont souvent floues et variables, cela n'est pas toujours compris par la population. Voilà ce qui explique le relâchement. On veut bien croire que les deux mètres sont essentiels, mais pourquoi Legault et Ford prennent une bière à moins de deux mètres et qu'une photo officielle diffuse l'événement largement ? Le principal intéressé a beau crâner, mais le mal est fait. Il a commis l'imprudence d'être pris en flagrant délit du bris de la règle. Ce qui est bon pour Minou est aussi bon pour Pitou. Je ne veux pas jeter la pierre au premier ministre pour cet instant d'imprudence. Qui n'a jamais péché jette la première pierre... Cela fait cependant partie du grand contexte qui explique le relâchement de toutes et de tous par rapport à ce virus qui lui ne fait pas de nuances dans les victimes qu'il infecte.

La culpabilisation à outrance

Devant les dérapages nombreux et les incidents de toute sorte qui font la démonstration qu'il y a un bris des consignes sanitaires et que ce bris peut avoir des conséquences mortelles pour plusieurs citoyennes et citoyens, les gouvernements doivent répéter et répéter les mêmes messages, chercher à construire le plus large consensus possible sur les consignes sanitaires essentielles et surtout éviter le recours à la culpabilisation à outrance pour faire entendre son message. L'incident de la coiffeuse de Thedford Mines la semaine dernière est un bel exemple qui illustre ce qu'il ne faut pas faire. Pointer du doigt les irresponsables n'est pas une panacée.

Serrer la vis et susciter la responsabilisation

Il ne faut pas non plus donner dans l'état totalitaire sociosanitaire en envisageant de s'introduire dans les résidences privées des gens avec une police sanitaire pour vérifier si les règles édictées par le gouvernement sont respectées. Une tentation pour celles et ceux qui n'ont en tête que le respect des règles, mais absurde pour celles et ceux qui comme moi croient à l'importance des droits fondamentaux des individus dans une société libérale. On peut bien agiter le bâton pour faire peur aux récalcitrants, mais vaut mieux se fier à la carotte pour des résultats durables. Ce qui ne signifie pas qu'il ne faut pas user de la coercition. Par exemple, indépendamment de qui la faute, une photo faisant la preuve du non-respect des règles devrait entraîner la fermeture de ce lieu et des sanctions exemplaires.

Autre idée, l'article 18 de la Loi sur l'assurance maladie permet de réclamer le paiement des frais payés par la collectivité pour soigner un individu lorsque les frais réclamés découlent d'une faute de cette personne. Article jamais utilisé, mais qui pourrait s'appliquer à un individu qui ne respecte pas les consignes sanitaires des autorités de la santé publique. Il faudrait plancher sur un projet qui permettrait d'enlever les privilèges de se faire soigner à nos frais à tous les récalcitrants qui croient que le virus n'existe pas et que c'est une invention. Payer pour ces frais d'hospitalisation pourrait être une menace plus convaincante que toutes les campagnes publicitaires et toutes les opérations de sensibilisation. Par exemple, être photographié dans une manifestation de plus de 250 personnes, ce qui contrevient aux règles, pourrait être une preuve suffisante pour retirer les privilèges du système de santé gratuit. Ce n'est pas simple, mais cela est usuel dans le domaine des assurances privées où une fausse déclaration sur son état de santé peut mener celle-ci à ne pas rembourser les coûts encourus.

Devant un relâchement et à l'aube d'une deuxième vague, un nouveau principe devrait être mis de l'avant par nos gouvernements : être responsable ou payer...


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