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À la recherche du temps perdu et révolu…


La question qui se pose et qui sollicite notre résilience et notre créativité pour les prochains mois et les prochaines années c'est, quel monde allons-nous retrouver au bout de ce chemin qui nous a été imposé par les circonstances.
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Photo : Source : Ligue du Midi.com
Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 6 mai 2020      

Marcel Proust a laissé un grand héritage littéraire avec son œuvre À la recherche du temps perdu. Cette suite romanesque a été écrite entre 1907 et 1922 et elle est une réflexion majeure sur le temps et la mémoire, les fonctions de l'art et aussi sur l'amour et la jalousie, mais surtout elle traduit un sentiment d'échec et de vide d'un être qui vit en dilettante et qui a plus peur de la mort que de la fin du mois.

Cette suite romanesque nous présente une galerie de centaines de personnages qui trace le portrait d'une époque. Un grand roman qui mérite d'être lu une fois dans son existence. Le titre de la suite romanesque de Proust traduit bien un état d'esprit qui met en vedette cette dichotomie entre des mondes qui s'opposent et pour lesquels avec ironie Proust cherche à en saisir le sens en cherchant à atteindre la totalité de la réalité.

Pendant cette période de pandémie, j'ai revisité cette œuvre gigantesque de la littérature française et j'y ai trouvé beaucoup de plaisir tout en constatant que nous vivrons ensemble au cours des prochaines semaines un véritable théâtre social en vrai dans le sillon de la reprise de nos activités et du retour à une certaine normalité. Réflexion libre sur le début de la fin du confinement.

Rien ne sera plus comme avant

La direction de la santé publique et les porte-parole de nos gouvernements n'ont de cesse de nous le répéter. Le retour à une certaine normalité dans nos vies que nous avons laissé se fera graduellement. Nous devons apprendre à vivre avec une nouvelle réalité, celle de la présence d'un virus dans nos existences et qui restera des nôtres même si nous n'avons ni remèdes, ni vaccins à proposer. La vie doit reprendre son cours en dépit de cette réalité. Nous sommes, nous les humains, des êtres fondamentalement sociaux, des êtres d'attachement. Cela nous convainc du fait tout simple que nous ne pouvons vivre éternellement en retrait des autres. Bien que palliatives et efficaces, les relations humaines virtuelles ont leur limite et elles ne pourront jamais remplacer le désir de prendre nos proches dans nos bras pour leur exprimer notre affection ni de donner une tape dans le dos de nos camarades pour leur témoigner notre amitié ou nos encouragements.

Une vie différente

Or, malgré et envers notre nature humaine profonde, rien ne sera plus comme avant pour les prochains mois et les prochaines années et nous devrons apprendre à vivre ce deuil. Ce premier deuil ne sera pas le seul. De nombreuses activités que nous aimions ne seront pas disponibles. Pensons en tout premier lieu à ces choses aussi simples et naturelles que d'assister à un spectacle de musique ou d'humour, à une pièce de théâtre, à participer à une grande fête dans les rues de notre ville ou dans un parc où l'on célèbre ensemble notre joie de vivre. Il y a aussi nos habitudes quant à nos déplacements et à notre mobilité. Les villes doivent faire une plus grande place aux piétons et aux cyclistes dans leurs rues pour favoriser le maintien d'une distanciation physique de six pieds. Paradoxalement, le transport en commun en sera affecté, car ce n'est pas une très bonne idée de s'entasser les uns et les autres dans des autobus ou des métros. Il faudra donc utiliser ce mode de transport en maintenant une distanciation physique, ce qui viendra en réduire l'efficacité et la rentabilité financière. Il faudra aussi limiter dans les prochains mois et les prochaines années nos déplacements vers les autres régions que celle où nous vivons. Cela est triste pour celles et ceux qui aimaient découvrir le Québec et le Canada. Nous vivons dans un décor enchanteur au Canada et c'est malheureux de penser que ce monde ne nous sera pas accessible pour un temps. Je vous fais grâce aussi des pertes que nous devoir affrontées par exemple, ne plus aller ailleurs dans le monde que ce soit dans le sud l'hiver ou en Europe l'été ou l'automne.

Outre la mobilité, les voyages, les activités culturelles, nos habitudes de consommation devront aussi être passablement transformées. Par exemple, cette habitude de rapporter à l'épicerie nos bouteilles ou cannettes de bière ou de boissons gazeuses semble à jamais révolue. Il faudra trouver de nouvelles façons de cueillir ces contenants usagés et il semble. Si j'en crois les déclarations de l'Association des détaillants en alimentation, que leurs membres ne veulent plus jouer ce rôle qu'ils n'ont jamais aimé et qu'il leur a été imposé par les gouvernements. Cela n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. Ce n'est pas que le Québec, les autres provinces et le Canada ont été mis sur pause, nos vies ont été mises au repos et de nombreux pans de cette vie que plusieurs d'entre nous appréciaient seront désormais un monde perdu.

Un monde retrouvé

La question qui se pose et qui sollicite notre résilience et notre créativité pour les prochains mois et les prochaines années c'est, quel monde allons-nous retrouver au bout de ce chemin qui nous a été imposé par les circonstances. Cela demeure la grande inconnue de l'équation présente de nos vies. Nous savons que nous sommes capables de pressentir avec lucidité les éléments qui seront perdus à jamais. Nous sommes cependant incapables de prévoir avec certitude le monde que nous retrouverons.

Le monde de nos enfants et de nos petits enfants sera différent de celui que nous avons connu. Cela est pour moi une certitude aujourd'hui. C'est bien tant mieux parce qu'il y avait de larges facettes de ce monde qui méritaient d'être évacuées de nos vies par exemple, la dépendance au carbone, le tourisme de masse, la marchandisation à outrance des biens culturels et la surconsommation d'objets aussi inutiles que nuisibles. J'en suis.

La confiance en nous

Source : parcoursrh.com

Néanmoins, l'avenir, le monde retrouvé sera fait des mêmes matériaux du monde d'hier. Il se peut, même si ce n'est pas ce que je souhaite, que ce nouveau monde que nous façonnerons ensemble à partir de maintenant sera celui que nous nous redonnerons et cela n'est possible qu'avec un ingrédient la confiance. Nous devons nous faire confiance. Nous devons oser aller à la rencontre de nouvelles idées qui bousculeront nos façons de vivre et nos vieilles façons de faire. Il faut donc nous faire confiance pour innover et aller là où personne ne nous attend pour nous réinventer une vie qui vivra avec le virus actuel et les autres qui viendront peut-être. Se réinventer une vie qui sera autre chose que la reproduction du même ou encore de nouvelles façons de maintenir l'emprise de l'éphémère sur l'essentiel. Il faut que nos vies soient autre chose que la collision de deux mondes, celui d'avant ou d'après la pandémie, comme le combat entre la bourgeoisie et l'aristocratie dans l'œuvre de Proust. Nous devons réinventer le monde avec des valeurs qui permettent de nouer une véritable relation entre notre essence véritable qui est celle d'un être social et le monde à réinventer. Il ne faut pas que nos efforts collectifs soient consacrés à la recherche d'un temps perdu et révolu...


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