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La nouvelle inquisition

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Photo : Tomás de Torquemada
Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 21 octobre 2020      

Au moment où l'on supprimera des programmes du ministère de l'Éducation dans les collèges, l'importance de se souvenir de nos liens avec le passé de l'Antiquité, du Moyen Âge et de la Renaissance apparait on ne peut plus crûment dans les débats actuels qui ont cours dans l'espace public. Qui apprendra à notre jeunesse dorénavant qui est Tomás de Torquemada, le grand responsable de l'inquisition espagnole qui a fait plus de 18 000 victimes au 15e siècle, 10 220 personnes furent brûlées et 6860 autres condamnés à être brûlées en effigie. Sans compter le régime de terreur qui s'est abattu sur la population de l'époque. Les Juifs en particulier ont été l'objet de l'opprobre de Torquemada. Certains historiens, dont Juan Antonio Llorente, estiment à 2000 le nombre de victimes juives. Ce qui a fait dire à certains historiens que l'inquisition de Torquemada fut le premier holocauste de l'histoire. Tout cela au nom de l'unité du catholicisme dans le royaume et de l'intolérance religieuse par l'Inquisition de 1478 à 1834. (Source Encyclopedie Universalis)

Mais que vient faire l'inquisition de Torquemada dans EstriePlus ce matin ? Il y a selon moi un rapprochement à faire entre l'intolérance religieuse d'hier et celle qui s'insinue dans nos vies et dans nos universités aujourd'hui. Réflexions sur l'intolérance contemporaine.

L'intolérance ici et maintenant

Je crois que je n'aurai pas à déployer beaucoup d'efforts pour obtenir votre aval, chère lectrice et cher lecteur, pour vous convaincre que nous voyons se déployer sous nos yeux de multiples formes d'intolérance au nom de principes de bien-pensants. Songeons par exemple à l'intolérance de certains groupes envers des produits culturels comme la pièce SLĀV de Robert Lepage ou encore à ces ridicules débats sur les safe space dans nos universités qui mènent à la censure de conférenciers comme le chroniqueur et intellectuel Mathieu Bock-Côté à l'Université du Québec à Montréal.

Au nom de grands principes, des groupes s'érigent en censeur de la bien-pensance et il serait désormais interdit de prononcer certains mots, de défendre certaines idées dans l'espace public parce qu'ils sont réputés être des atteintes aux droits de certains. Cela va de l'existence de certains personnages historiques dans notre mémoire collective à la police de la pensée qui veut que les blancs soient des victimes des actes de leurs ancêtres pour les discriminations et les actions qu'ils ont pu faire à l'endroit des autochtones, des minorités racisées, des femmes et de tous ceux qui se sentent infériorisés par le système social actuel.

Par exemple, ce débat qui fait rage sur le refus du premier ministre du Québec de reconnaître le concept de racisme systémique comme étant la caractérisation de la société québécoise. J'ai eu l'occasion de m'exprimer sur ces sujets délicats dans des chroniques antérieures, je veux quand même rappeler ici que je suis plutôt en accord avec notre premier ministre François Legault sur son approche. Non à une querelle de mots, mais oui à des actions qui vont enrayer et même faire disparaître le racisme de nos rapports sociaux. Ceux qui pensent que cela est un débat simple et facile auraient intérêt à lire la chronique de samedi dernier de Paul Journet intitulé Tentative de démêlage collectif parue dans La Presse. Mais le pire de tous les débats c'est celui qui porte atteinte à la liberté de penser dans nos universités.

L'affaire de l'Université d'Ottawa

Nous avons appris cette semaine que la professeure Verushka Lieutenant-Duval a été suspendue le 23 septembre à la suite d'une plainte déposée par une étudiante pour avoir prononcé le N-word interdit dans le cadre d'un cours où elle cherchait à expliquer que certains termes utilisés contre des minorités dans l'histoire étaient parfois réappropriés dans un sens positif et formateur pour l'identité du groupe victime de l'utilisation d'un terme péjoratif à l'origine. Le crime de la professeure est d'avoir prononcé le mot maudit N-word. Un étudiant de l'Université d'Ottawa Kerry Menelas a affirmé au journal Le Droit d'Ottawa que : « Je ne peux pas me permettre de dire qu'elle est raciste, mais elle a utilisé un mot raciste dans un cours. C'est inacceptable et c'était aussi un comportement non éthique pour un professeur et irrespectueux en même temps ». Voici ce que je pense de cela. Cela n'a pas de bon sens. Pire encore, la direction de l'Université d'Ottawa a agi avec la pire des lâchetés en suspendant cette professeure et qui plus est sans l'entendre. Dans quel monde vivons-nous ?

Si cela était un cas isolé, je n'en ferais pas le sujet d'une chronique, mais rappelez-vous cette autre professeure de l'Université Concordia qui a été l'objet de représailles pour avoir cité le titre de l'essai de Pierre Vallières Nègres blancs d'Amérique sur la situation coloniale, de son point de vue, des Canadiens français à la sortie des années 1960.

Que fait-on de la liberté de penser, de la liberté d'expression et surtout de la liberté académique des professeurs et de la liberté de réfléchir des étudiantes et des étudiants ? Tout cela crée une atmosphère semblable à celle de la révolution culturelle de Mao Tsé Toung en Chine et qui a donné lieu à de nombreuses arrestations de Chinoises et de Chinois qui pensaient le monde différemment. Je compare les situations en sachant que c'est différent, mais je suis inquiet de voir s'insinuer dans notre espace public le début d'une intolérance qui peut mener au pire. Cela je le dénonce de toutes mes forces.

L'exaspération

Une image contenant extérieur, bâtiment, personne, photoDescription générée automatiquementCe qui m'exaspère de ce débat c'est que je suis profondément convaincu que les races, cela n'existe pas. C'est une pure conception de l'esprit. Pour moi, tous les humains, quels que soient le sexe ou les affinités qu'ils s'attribuent, qu'importe la couleur de leur peau ou leur langue, sont égaux et méritent un traitement juste et équitable de l'État et de nous tous. Bien sûr, le colonialisme, l'esclavage, le capitalisme, le libéralisme sont autant de phénomènes de société qui ont influencé le cours des choses. Il y a bien sûr des phénomènes fondés sur l'ignorance et la bêtise qui s'appelle le racisme, le sexisme, la misogynie, la discrimination et bien souvent ce sont les femmes, les minorités différentes des majorités qui en font les frais. Cela c'est du racisme, du sexisme et que sais-je encore. C'est le devoir des pouvoirs publics de combattre ces phénomènes au nom du fait que nous sommes tous égaux et que nul ne doit souffrir d'un traitement différencié au nom de ses caractéristiques personnelles. Cela ne signifie pas pour autant qu'une collectivité nationale comme la nation québécoise ne doit pas légiférer pour protéger sa nation, par exemple avec des lois comme la loi 101 afin de préserver la langue et la culture française et d'assurer la pérennité de notre petite nation francophone noyée dans un océan anglophone.

Il faut dialoguer bien sûr, mais refuser de discuter sur de fausses prémisses comme celles que cherchent à nous imposer les nouveaux Torquemada du 21e siècle au nom d'une bien-pensance. Sinon, nous ferons face à une nouvelle inquisition...



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