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Mon voisin Denis…

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 24 juillet 2024      

Aujourd'hui, ma chronique aborde un sujet pas très jojo. Il s'agit en quelque sorte d'un hommage à mon voisin, Denis Beaudoin, qui est décédé bêtement d'un infarctus le 12 juillet dernier. Je me permets de chroniquer sur cela parce que Denis était un personnage public avantageusement connu à Sherbrooke, en Estrie et au Québec. Un journaliste émérite qui avait l'esprit critique aiguisé et qui détestait plus que tout, les gens qui effectuaient mon travail. Il n'aimait pas rencontrer d'obstacles entre lui et sa source. J'en ai pris la mesure alors que je travaillais comme conseiller politique auprès de Monique Gagnon-Tremblay. C'est dans le cadre de ces fonctions que j'ai connu mon voisin Denis. J'aurai l'occasion de le rencontrer dans de nombreuses autres situations. Je vous raconte.

Le golf à Milby...

Denis Beaudoin était un excellent golfeur. Ce que je n'ai jamais été capable de devenir malgré mes efforts assidus. J'ai toujours eu un handicap de 20. Quand j'ai vraiment commencé à jouer au golf, c'était en 1986 ou 1987 et j'étais devenu membre au Club de golf à Milby avec des amis Michel, Gaétan, Yvan et Denis. Contrairement aux autres, Denis était un lève-tôt, comme moi, nous avions donc pris l'habitude de jouer ensemble très tôt le matin, dès l'ouverture du club. Il faisait preuve de beaucoup de patience avec moi et n'hésitait pas à me prodiguer des conseils afin que je puisse m'améliorer. La seule condition si l'on peut l'appeler ainsi était que notre camaraderie au golf ne devait jamais être évoquée dans nos rapports professionnels. En d'autres termes, il me disait que si je jouais au golf avec lui pour créer une relation profitable pour mon employeur du temps, Monique Gagnon-Tremblay, ce serait peine perdue. Il a tenu parole et je crois même que dans des reportages impliquant mes patrons ou mes clients il était beaucoup plus incisif avec moi qu'avec n'importe qui d'autre. Ça, c'est le Denis Beaudoin journaliste que j'ai connu.

Journaliste et relationniste

Denis Beaudoin a été journaliste pendant de nombreuses années à la radio d'abord et à la télévision ensuite. C'est d'ailleurs dans ce cadre que je l'ai connu. Puis, les années ont passé, j'ai quitté la politique (si on peut dire que j'ai un jour pu quitter la politique...) et je suis devenu un relationniste professionnel pour le compte de divers clients. Une fois, Denis Beaudoin que j'avais croisé dans une des conférences de presse que j'avais organisées m'a dit : « tu sais Daniel ça ne peut pas marcher entre toi et moi. Je te trouve bien sympathique, mais tu représentes ce que j'abhorre le plus dans mon travail. » Interloqué par cette affirmation, je lui demande de préciser sa pensée. Il me rétorque : « tu es un obstacle à mon travail, tu es le gardien de la porte qui me mène à ma source. » J'ai eu beau tenter de lui expliquer que j'étais plutôt un facilitateur qu'un obstacle, mais on ne s'est jamais entendu là-dessus.

Denis le politicien municipal

J'ai recroisé Denis plus formellement lors de la campagne électorale municipale de 2009 alors qu'il était candidat dans le district de Jacques-Cartier contre entre autres Nathalie Goguen et Marcel Fabi. Portant les couleurs du Renouveau sherbrookois, Denis n'a malheureusement pas réussi à gagner son siège pour son ami, Bernard Sévigny. J'y étais, car j'avais travaillé au plan de campagne du Renouveau sherbrookois. Lors des diverses rencontres des candidats et des candidates, j'ai retrouvé le Denis que j'avais toujours connu à l'esprit critique acéré. Sans en parler à personne, je m'étais fait la réflexion que Denis Beaudoin serait malheureux dans le rôle de conseiller au pouvoir, lui qui a toujours détesté tous les pouvoirs et qui se faisait le porte-voix des dysfonctionnements et des ratés de nos gouvernements. C'est à cette époque que je suis devenu par hasard le voisin d'en face de Denis Beaudoin.

Mon voisin que je considérais mon ami...

Denis et moi n'avons jamais été ce que l'on peut appeler des amis même si nous avions beaucoup de comportements s'y apparentant : surveillance de nos maisons en l'absence des occupants, prêts d'outils, coup de main au déneigement d'hiver, etc. Je retiens surtout nos longues conversations politiques sur le Québec, sur les États-Unis et sur la politique municipale. Je ne vous raconte pas ces discussions puisqu'elles étaient privées, mais je puis vous dire qu'elles me manquent déjà. Denis Beaudoin était important dans mon environnement et son décès vient brutalement rompre ces conversations. Je trouve cela difficile la mort.

Que signifie la mort pour nous les vivants ?

La mort est une réalité incontournable de la vie. En effet, chaque individu qui naît est destiné à connaître, un jour ou l'autre, ce mystère ultime : la fin de son existence terrestre. Pour celles et ceux qui restent, c'est toujours une épreuve difficile à surmonter. La perte d'un être cher laisse derrière elle un vide indélébile et des questions sans réponse. C'est un moment de douleur intense où les émotions se mêlent et où le deuil devient un long chemin à parcourir. Ici, mes pensées vont à Louise à sa fille et à sa famille.

La disparition progressive du monde se manifeste également à travers la mort. Chaque disparition laisse un trou dans le tissu social et familial, contribuant ainsi à une sensation d'effritement, de fragilité de notre réalité commune. Les cicatrices laissées par les départs successifs marquent les esprits et façonnent la perception que nous avons du monde qui nous entoure. À chaque décès, c'est un peu de notre univers intérieur qui s'érode, laissant place à une conscience aigüe de notre propre finitude.

Dans ce contexte, la mort devient un miroir de nos propres peurs et de nos angoisses existentielles. Elle nous confronte à l'idée de notre propre mortalité, nous rappelant que nous ne sommes que de simples grains de sable dans l'immensité de l'univers. Cette prise de conscience peut être à la fois libératrice et terrifiante, car elle nous pousse à réévaluer nos priorités, nos choix de vie et nos relations avec les autres.

La disparition progressive du monde se superpose à celle de nos proches, créant une atmosphère de mélancolie et de nostalgie. Les souvenirs deviennent nos seuls liens avec les disparus, les vestiges d'un passé révolu qui s'estompe peu à peu dans les tréfonds de notre mémoire. Nous nous accrochons à ces souvenirs comme à des îlots de stabilité dans un océan d'incertitude, cherchant à préserver ce qui peut encore l'être de notre histoire commune.

Malgré tout, la mort et la disparition progressive du monde nous invitent aussi à célébrer la vie et à saisir pleinement chaque instant. Elles nous rappellent que rien n'est éternel, que tout est éphémère, et que c'est précisément cette impermanence qui donne toute sa valeur à chaque souffle, à chaque regard, à chaque étreinte. Elles nous incitent à chérir nos êtres chers, à cultiver l'amour et la bienveillance, à transcender nos peurs pour mieux embrasser la beauté fugace de l'existence.

Repose en paix Denis !

La mort pour les personnes qui restent et la disparition progressive du monde sont des réalités incontournables de l'expérience humaine. Elles nous confrontent à nos limites, à nos fragilités, mais aussi à notre capacité à transcender l'adversité et à trouver du sens dans l'absurde. Elles nous poussent à grandir, à évoluer, à nous reconnecter à l'essentiel, pour mieux affronter l'insondable mystère de la vie.

Dans mon cas, je n'aurais plus ces discussions impromptues avec Denis Beaudoin, mais au moins même si nous n'étions pas des amis officiels, j'aimais bien lui répéter, à la fin de nos conversations épisodiques : « Moi en tout cas, je l'aime bien Denis Baudoin. » Il a toujours feint de ne pas entendre, mais je sais qu'il avait bien compris qu'au-delà de toutes les relations que nous avions eues, la plus importante était et restera toujours celle de mon voisin Denis...


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