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  CHRONIQUEURS / Deux mots à vous dire

Marcher droit devant, vers le possible!

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François Fouquet Par François Fouquet
Lundi le 20 novembre 2023      

J'ai grandi dans un entre-deux générationnel. Dans le livre des générations, je suis né dans la conclusion des boomers et la préface des X. Je ne suis donc pas un pur. Et ça me plaît bien!

La musique habitait et habite toujours mon quotidien.

Pour moi, en '67, tout était beau! Pas de fleurs dans les cheveux, mais dans le temps, j'avais des cheveux! Je rêvais qu'un jour, j'amènerais ma blonde dans ma Camaro, sur tous les chemins d'été. Je vivais dans un monde où l'espoir régnait encore. C'était le début d'un temps nouveau.

La radio chantait que le temps était bon, le temps était beau, enchaînant avec un j'ai deux amis qui sont aussi mes amoureux bien surprenant, pour l'époque! L'amour devenait libre, et les filles pouvaient se permettre de donner un lift dans sa propre Corvair à celui qu'elle identifiait comme l'homme de sa vie!

La Révolution tranquille essayait de conjuguer au présent le nouveau modèle social proposé.

J'ai été ému en entendant on a mis quelqu'un au monde, on devrait peut-être l'écouter! Je rêvais d'avoir les pieds pendants au bout du quai. Mais bon, on n'avait pas de chalet. Puis, je me suis laissé emporter par les gens de mon pays, ceux qui sont gens de paroles et gens de causerie.

J'ai été heureux d'un printemps. Mais là, déjà, le ton festif servait à souligner, voire dénoncer, quelque chose. Un trouble s'est installé. Comme quand on voit qu'il n'y a pas grand-chose dans le ciel à soir

Souvent, j'ai trouvé refuge en fredonnant Gens du pays. Ces gens du pays, dont moi, à qui c'était le tour, de se laisser parler d'amour.

Je nourrissais l'espoir à grands coups de amène-toi chez-nous, je t'ouvrirai les bras! Et de bye bye, nuages, welcome soleil, je t'ai attendu toute la journée!

Dans ma voiture, le système de son acheté chez Distribution aux consommateurs jouait à tue-tête À qui appartient le beau temps de Piché.

Plus tard, Séguin m'a raconté la journée d'Amérique. Journée de soupirs. Journée de désirs. Je me suis ouvert les yeux sur d'autres réalités en chantant passe-moé la puck, pis j'vas compter des buts! J'ai compris que la nouvelle rue principale oubliait le principal...

Ça prend parfois des airs musicaux heureux et festifs pour charrier des réalités sombres et à la limite du tolérable. La cuillère de miel qui fait avaler plus doucement la pilule.

Bref, la musique est importante dans ma vie. Elle me rassure aussi quand j'entends qu'on va s'aimer encore...

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Le chemin de l'espoir

Au fil des quatre dernières décennies, il y a eu de la pop. Beaucoup de pop. Une académie pour enseigner la pop. Une académie pour fabriquer une star. Un rêve ultime: briller. Voir son nom en haut de l'affiche! On a fait aussi concourir des voix en tentant de coller des émotions plus vraies que vraies à la vie des participants.

Pas que tout ça soit mauvais. Qui suis-je pour condamner?

Sauf que... Je m'alarme toujours lorsque tout l'exercice est concentré sur un chemin unique : être découvert; être pris en main par des professionnels; chanter des paroles modulées pour plaire au public avec la précision chirurgicale d'une efficace campagne de publicité. Tout ça, finalement, pour être au sommet! Et briller. Comme si c'était l'unique but de l'affaire.

Une fabrique d'étoiles filantes.

Urgent besoin d'espoir

Quelques jours après le décès de Karl Tremblay, ma réflexion se poursuit et je suis habité par un urgent besoin d'espoir. Besoin de sens, aussi. De sens social, j'entends.

Les guerres se multiplient. Les banques alimentaires sont vides. On n'a pas d'argent pour mieux payer les gens du secteur public, mais on est riches au point de payer des millions de dollars pour accueillir deux matchs hors concours de la Ligue nationale de hockey à Québec. J'ai le goût de crier ma colère face à cette innommable bêtise!

Urgent besoin d'espoir et de sens, je disais.

Et je réalise que cet espoir existe.

En fait, cet espoir est incarné par le parcours tellement atypique des Cowboys fringants. Un parcours de qualité, certes, mais un parcours qui a évité le modèle de réussite programmée. Avec les Cowboys, pas de premières pages de magazine, pas d'entrevues à tous vents, pas de scandales, pas de bull.... Un parcours atypique qui débouche sur un deuil atypique.

Des millions de personnes vivent une peine réelle et toute personnelle. Ce deuil est collectivement personnel. Des milliers de personnes, partout au Québec, ont senti le besoin de se rassembler, comme dans les spectacles des Cowboys fringants. En deuil, on se réfugie là où on est bien.

Mais il est où, l'espoir, il est où ? 

Il est dans ce que Karl et son groupe ont incarné : le possible.

Le possible, c'est réaliser que le chemin de notre vie nous appartient. Qu'on n'a pas à marcher sur un chemin tracé d'avance et prévu dans un modèle fixe.

Le possible, c'est réaliser que le virtuel n'est pas une relation en soi. C'est en multipliant les contacts humains avec les gens que les Cowboys ont réussi à se loger dans leur vie intime. Pas de centaines de millions de clics sur un clip, mais des millions de personnes, sur 25 ans, tout près les unes des autres, qui vivent un moment à la fois très personnel et très collectif!

Le possible, c'est réaliser que c'est l'absence de prétention qui ouvre la porte d'accès à l'autre. Un égal à égal vrai. Pas joué, pas mis en scène. 

Le possible, c'est réaliser que l'authentique ne se maquille pas. Et qu'il ne se perçoit que dans l'œil de l'autre, s'il le sent vraiment.

Je me concentre sur le possible. Pour ne pas tuer l'espoir.  

Et je décide de maintenir les chansons des Cowboys fringants comme des repères dans ma vie.

Et je me répète qu'elle sera longue, l'expédition. Et que même si on n'en revient jamais vivant, il faut marcher, droit devant.

 

Clin d'œil de la semaine

Elle sera longue, l'expédition. Je l'aurais souhaitée plus longue pour Karl...



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