Les temps sont durs. Moralement, à tout le moins.
Pour peu qu'on se préoccupe de notre entourage immédiat et
plus large, il y a plusieurs raisons d'entretenir une inquiétude, une forme de
torpeur plus ou moins envahissante.
« Quand je colle mon oreille au sol, j'entends venir la
cavalerie ! », répétait mon mentor Raymond Tardif pour m'inviter à voir venir les coups. Bons
et moins bons. Surtout les moins bons...
J'en ai parlé la semaine dernière, mais je crois comprendre
un bout de la colère qui gronde dans le cœur et l'esprit des Nord-Américains.
Mais cette compréhension, bien que partielle, ne peut justifier le virage
radical vers la droite qu'on s'apprête à prendre sur notre vaste territoire.
En fait, ce n'est même plus de la droite qu'il est vraiment
question, mais d'une destruction de ce qui existe et d'un remplacement basé sur
des croyances, des pensées magiques et surtout, animé par un groupe d'élite
(Trump et sa tribu, incluant Elon Musk qui compte bien se servir de sa citoyenneté
canadienne pour intervenir aussi dans la prochaine élection au pays).
Pour contrer la grande noirceur que tout ceci annonce, il y
a des pépites d'espoir particulièrement vivantes.
Mes deux dernières semaines
Le 7 novembre dernier, on me confiait, pour une 8ᵉ année, l'animation du gala
des Prix d'excellence en environnement. La 30ᵉ édition.
Ce n'est pas rien. Mettre en place un événement, c'est une chose. Perdurer en
est une autre !
250 personnes réunies pour célébrer des actions concrètes
pour la sauvegarde et la protection d'un environnement qui est vital, mais
qu'on voit souvent comme un accessoire acquis.
Ironiquement, la toute première fois que j'ai animé le gala,
c'était au lendemain de la première présence de Trump au pouvoir. Le négationniste
des changements climatiques venait de jeter une ombre au tableau. Je me
souviens de mon premier clin d'œil à la foule réunie en 2016 :
« Trump est élu... Est-ce qu'on tient le gala quand même ? »
Évidemment que la réponse était oui ! Cette année,
on s'est heurté à
nouveau à un Trump qui, cette fois, est plus prêt que jamais.
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En terminant le gala 2024, je lançais l'image suivante aux
participants : « chaque projet présenté ce soir, du plus petit au
plus grand, constitue une pépite d'espoir. La grandeur ou l'importance des
projets ne se mesure pas selon la taille, mais bien à leur pertinence. Je vous
remercie de représenter cet espoir essentiel dans un monde qui, comme le
chantent si bien les Cowboys fringants, partout, tient avec de la
broche. »
La semaine suivante, c'était le gala de l'entrepreneuriat
collectif qui regroupait des coopératives et des organisations à but non
lucratif. Encore une fois, des pépites d'espoir sont apparues. Des entreprises
dont la mission est vitale pour les communautés.
Oui, oui, des entreprises !
Je sais, souvent les entreprises sans but lucratif et les
coopératives sont vues comme des bêtes étranges. Des sous-produits d'une
économie qui s'est bâtie autour du principe suivant : faisons en sorte que
les entreprises fassent plus et plus de profits et, par magie, tout le reste de
la société s'en portera bien.
C'est tellement ancré en nous que notre système scolaire
n'enseigne pas, ou très peu, les modèles entrepreneuriaux différents des
modèles traditionnels dans lesquels la valeur est uniquement liée à la capacité
d'accumuler du profit.
Je travaille dans un modèle coopératif depuis 15 ans. Nous
avons reçu, à quelques reprises, des étudiants au MBA (Master of business
administration, en latin ...), je me souviens des sourcils froncés et des
yeux méfiants quand on parlait de certains indicateurs qui ne prévalaient pas
nécessairement dans notre modèle. La rentabilité est là pour assurer la
pérennité, mais elle n'enrichit pas un propriétaire ou un groupe
d'actionnaires.
Je souris encore à me rappeler la réaction de certains
étudiants qui nous répondaient : « Votre modèle détruit de la valeur.
Il n'en crée pas ! »
Ma réponse ?
« Définissez-moi votre notion
de valeur ». Je n'ai pas eu de réponse...
Les pépites d'espoir, ce sont ces entreprises qui
choisissent des indicateurs de performance différents. Qui gèrent en fonction
d'une mission qui est la leur.
Qui comprennent que si une entreprise enrichit sa
communauté, elle crée la valeur la plus noble.
Clin d'œil de la semaine
Triste constat : ce qui n'est pas contenu dans un
tableau Excel n'a pas de valeur aux yeux de bien des gens...