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Le Québec, trop petit pour jouer dans la cour des grands?

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 2 octobre 2024      

L'actualité politique nous a habitués ces dernières années à tous les excès. Le débat surréaliste en ce moment sur l'implantation d'une usine de Northvolt à Saint-Basile-le-Grand en est une illustration convaincante. Comme l'a un jour écrit mon auteur fétiche Albert Camus, « mal nommer les choses, c'est ajouter aux malheurs du monde. » Ces jours-ci la classe politique et la plupart des commentateurs politiques font notre malheur dans les débats sur Northvolt, Hydro-Québec et le projet de loi 69. Incursions furtives dans des débats mal engagés.

 Le contexte

Le Québec, avec son riche potentiel hydro-électrique et son engagement envers la transition énergétique, se trouve à un carrefour crucial où les choix politiques et économiques pourraient redéfinir son rôle sur la scène mondiale. Le projet de loi 69, qui vise à favoriser le développement de nos ressources hydro-électriques et le projet de la filière batterie, s'accompagnent de débats nourris sur l'avenir d'Hydro-Québec et sur l'à-propos de l'investissement du gouvernement Legault dans l'implantation de Northvolt en Montérégie. Les défis financiers rencontrés par Northvolt, un acteur majeur dans la production de batteries électriques, viennent ajouter à la confusion.

Rationaliser notre développement hydro-électrique

 Le projet de loi 69 constitue un pas important pour le Québec pour rationaliser et ordonner le développement et les capacités de son réseau hydro-électrique tout en cherchant à en faire un atout dans ses efforts pour décarboner l'économie québécoise. Le gouvernement Legault veut aussi se servir de cette production d'hydro-électricité accrue pour favoriser le développement économique du Québec. D'où un projet comme Northvolt et les débats sur le danger qu'Hydro-Québec devienne un Dollarama de l'électricité selon les mots de l'ex-PDG d'Hydro-Québec, Sophie Brochu. Pourtant, il serait plus sage de ne pas nous emmêler dans nos pinceaux.

Adopter le projet de loi 69, accroître nos capacités hydro-électriques et faire de cette énergie renouvelable propre sont des éléments d'un même puzzle. Ils sont des éléments distincts d'une stratégie de développement économique encore à écrire et à débattre entre nous Québécois. Il y a place au débat. Par exemple, les verts foncés veulent une décroissance de l'économie et souhaitent une rupture avec le capitalisme. Ils militent pour une économie circulaire et pour une société qui réduit ses besoins de consommation. La petite musique derrière ces discours pour sauver la planète signifie moins d'automobiles individuelles, plus de transport en commun et une réduction significative du niveau de vie auquel nous sommes habitués.

Dans un autre camp, fortement opposé aux verts foncés, on retrouve les adeptes du développement durable avec une forte croissance économique. Les adeptes de l'écoblanchiment et de la pensée magique qui croient que nous pouvons combattre les effets du réchauffement de la planète sans effort. C'est parmi ces gens que l'on retrouve celles et ceux qui ne croient que du bout des lèvres à la crise climatique où l'on recrute les adeptes d'un réseau routier toujours plus étendu.

La vérité relative, l'équilibre que nous devrions encourager, se situe entre ces deux positions. Plus de transport en commun, moins d'autos individuelles, une plus grande densification douce dans nos villes et une réduction de notre rythme de consommation. C'est à ce débat que devra nous convier le projet de loi 69.

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Le projet de loi 69

 Le projet de loi 69, présentement à l'étude à l'Assemblée nationale, a pour objectif d'accélérer le développement de nos ressources hydro-électriques en recalibrant les relations entre Hydro-Québec et les différents acteurs économiques et sociaux. Je suis d'avis que le gouvernement du Québec aurait tout avantage à profiter de l'adoption de ce projet de loi pour susciter un vaste débat de société sur l'avenir économique du Québec en marge de sa production d'énergies renouvelables afin de contribuer à décarboner notre économie. Ce débat permettrait de mieux baliser les discussions sur la hausse des tarifs, les besoins des entreprises en matière d'électricité et nos relations avec les peuples autochtones qui sont des partenaires essentiels au développement de la richesse que constitue notre énergie hydro-électrique.

Par ailleurs, Hydro-Québec est partie intégrante de notre patrimoine de fierté collective. Il va de soi que nous pouvons débattre de son avenir et de son rôle dans notre volonté de contrer les effets délétères des changements climatiques et de poursuivre le développement économique, social et culturel de la nation québécoise. En l'absence de véritables débats, l'adoption du projet de loi 69 risque de passer à l'histoire comme une formidable occasion manquée de mobiliser le Québec derrière son principal atout pour son avenir.

La filière batterie

La filière batterie est, de l'avis du gouvernement Legault, cruciale dans le contexte de la transition énergétique et de la lutte contre les changements climatiques. Cela est en partie vrai. La filière batterie est en effet au cœur des technologies vertes, notamment pour les véhicules électriques, le stockage d'énergie et les applications renouvelables. En soutenant cette initiative, le gouvernement québécois espère attirer des investissements, créer des emplois et favoriser l'innovation. Il y a des résultats concrets qui émergent du déploiement de cette stratégie.

Toutefois, cette ambition doit être analysée à la lumière des défis économiques globaux qui pèsent sur ce secteur et des résultats concrets que nous pouvons analyser dans nos premiers balbutiements de mise en œuvre de cette vision de développement économique. Le soutien du gouvernement Legault à l'implantation de Northvolt, fondée en Suède, est un exemple emblématique de cette nouvelle politique. Le moins que l'on puisse dire c'est que cela augure mal pour la crédibilité de cette vision de développement économique portée par le gouvernement Legault.

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Les difficultés financières de Northvolt

Les défis rencontrés par Northvolt soulignent les risques inhérents au développement d'une industrie aussi intensive en capital que celle des batteries. Malgré une forte demande mondiale pour les véhicules électriques et les solutions de stockage d'énergie, Northvolt a dû faire face à des coûts de production élevés et à des retards dans la construction de son usine. Cette situation pose des questions sur la viabilité économique à long terme de la filière batterie, non seulement pour Northvolt, mais également pour ses partenaires et ses fournisseurs, y compris Hydro-Québec.

Le soutien financier aux entreprises comme Northvolt est un élément clé des stratégies gouvernementales visant à stimuler la transition verte. Cependant, les échecs d'entreprises comme celle-ci peuvent également engendrer des conséquences négatives pour l'ensemble du secteur. Si des entreprises de ce calibre rencontrent de telles difficultés, cela peut nuire à la confiance des investisseurs dans la filière batterie au Québec et au-delà. Les débats qui ont cours au Québec sur le sujet font la démonstration éloquente que cela nuit à l'idée même d'une transition énergétique vers l'électricité. Il faut s'assurer qu'Hydro-Québec n'est pas emportée dans un tourbillon de négativisme sur ses capacités futures d'augmenter considérablement sa production hydro-électrique. D'autant plus que l'élection probable des conservateurs de Pierre Poilievre risque de mettre en valeur sa vision de tout au pétrole et faire ainsi régresser le Québec et le Canada dans sa volonté de lutter contre les changements climatiques.

Hydro-Québec

 Hydro-Québec est un acteur stratégique au cœur des débats sur le projet de loi 69 et la filière batterie. Entreprise d'État à la réputation solide, mais qui doit désormais se positionner devant des enjeux à la fois économiques et environnementaux. Pendant des décennies, Hydro-Québec a joué un rôle fondamental dans le développement énergétique de la province, mais la nécessité de s'adapter aux nouvelles réalités du marché de l'énergie et aux attentes croissantes en matière de durabilité crée des pressions croissantes.

Hydro-Québec, armée de ses ressources hydro-électriques, a la capacité d'alimenter l'industrie pour décarboner le Québec et pour favoriser le développement économique dans une stratégie « en même temps. » L'idée d'une filière-batterie est de faire, selon les mots du premier ministre Legault, du Québec la batterie de l'Amérique du Nord, cela n'est pas une mauvaise idée en soi. Elle vaut bien les promesses de l'ancienne cheffe libérale Dominique Anglade sur une filière-hydrogène. Par l'adoption d'une stratégie « en même temps » par Hydro-Québec : on peut envisager de développer la capacité hydro-électrique du Québec par diverses sources (solaires, éoliennes, barrages), la décarbonation de l'économie, l'électrification des transports et le soutien au développement économique. Cette posture est celle à laquelle nous devons nous attendre de la part d'Hydro-Québec. Cela pourrait non seulement renforcer son rôle dans l'économie québécoise, mais aussi positionner la province comme un pôle de production durable. Toutefois, l'enjeu est de savoir si Hydro-Québec saura évoluer pour répondre aux besoins d'un marché énergétique mondial en mutation rapide.

Le pouvoir et le vouloir de nos ambitions

La question centrale qui émerge de ces débats est celle de la taille et de la capacité du Québec à s'imposer dans un contexte économique mondial où les grands acteurs dominent. À première vue, le Québec peut sembler être une nation trop petite pour rivaliser avec des pays comme la Chine ou les États-Unis, qui détiennent une part de marché significative dans la production de technologies clés, notamment dans le secteur des batteries. Cependant, le Québec possède des atouts indéniables qui pourraient contrecarrer cette argumentation.

Premièrement, le Québec dispose d'une richesse en ressources naturelles et, en particulier, d'une capacité hydro-électrique abondante. Cela constitue une base solide pour développer une économie verte, notamment dans le secteur des batteries, où une source d'énergie renouvelable et bon marché est primordiale. Deuxièmement, le Québec bénéficie d'un savoir-faire technologique et d'une expertise en matière de recherche et développement, renforcé par des institutions académiques de renom et un écosystème d'innovation dynamique. De plus, l'engagement du gouvernement québécois envers la transition énergétique et le soutien aux initiatives écologiques peut également jouer un rôle clé dans l'attraction d'investissements étrangers, limitant ainsi les effets de la taille du marché. En se positionnant clairement comme un leader dans le secteur des batteries et en promouvant la durabilité, le Québec peut renforcer son image sur la scène internationale.

Le projet de loi 69, les défis financiers de Northvolt constituent des éléments clés d'un moment crucial dans notre réflexion collective sur l'avenir d'Hydro-Québec et le rôle du Québec dans l'industrie énergétique mondiale. Le chemin à parcourir est semé d'embûches, mais avec une vision claire et un engagement collectif, le Québec peut aspirer à un avenir lumineux et durable dans le monde des grandes nations. Alors je vous pose la question : Le Québec est-il trop petit pour jouer dans la cour des grands ? 

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