Parfois, le processus de réflexion s'enclenche de façon
inopinée.
Un rendez-vous avec ma « kiné » et une question toute simple
de sa part : « comment ça va? ».
Je sais, on répond à cette question plusieurs fois par jour.
C'est un automatisme. Automatique comme commenter le temps qu'il fait dehors.
Généralement, « ça va ? », c'est une façon de saluer bien plus qu'une réelle
intention de chercher à savoir si ça va vraiment. Même que, quand on y pense,
très souvent, on serait bien embêtés si la personne répondait « ça ne va pas
bien du tout! ». Il faudrait s'arrêter, prendre le temps et tout. Vous savez,
ce temps qu'on n'a pas?
Bref.
Mais là, disons que c'était un « ça va ? » intéressé.
Au sens où il demandait une réponse plus large. Et la petite question a activé
ma réflexion bien au-delà de mon temps de réponse! Après ma rencontre, ça s'est
poursuivi : mais comment je vais, moi, 14 mois après le début de
cette Covid.
Chacun a sa réalité. La pandémie a cette faculté de mettre
en lumière les trop vides et les trop-pleins de nos vies! Je suis chanceux. Je
croise encore des gens au travail. Je n'ai pas manqué de travail. Mes enfants
sont autonomes et s'en sortent quand même bien.
Mais il y a un mais.
Comme une langueur. C'est le bon mot, je crois bien. Et pourtant,
j'essaie! Mais c'est comme si le simple fait de me mettre en action est plus
lourd. Je vais travailler. Je réponds bien aux critères de l'emploi (je crois!).
Je fais ce que j'ai à faire.
Voilà pour la vie professionnelle.
Mais quand j'enlève mon veston et que la vie personnelle reprend
son cours, comment je vais, moi?
C'est là que le mot langueur s'applique.
Comme une fin d'année scolaire
J'ai un drôle de souvenir des fins d'année scolaire. Comme
j'ai souvenir de ma relation avec les dimanches après-midi de mon enfance. « Ça
donne quoi d'avoir du fun un dimanche alors qu'on sait que ça va aboutir sur un
lundi... »
Je me suis dit ça longtemps.
Lors des fins d'année scolaire, j'enviais mes amis qui
compartimentaient les trucs de leur vie. Aujourd'hui, je m'éclate, demain,
j'étudierai. Moi, je traînais cette façon de vivre dans le futur : une
fois l'examen passé, j'aurai du fun.
J'ai finalement compris qu'il y a toujours un « examen » sur
notre parcours. C'était un cul-de-sac, mon affaire.
Je vis maintenant avec des cases bien mieux définies. Et
j'essaie de goûter au temps qui passe.
Et ça marche généralement pas mal bien!
Mais là, il y a cette langueur. Comme si je marchais avec
des poids attachés aux chevilles. J'ai la procrastination plus facile. Me
mettre en marche demande un effort que je ne connaissais pas avant (ou pas
autant!).
« Comment ça va? »
Difficile à dire, finalement. C'est comme si ça allait bien,
mais que je n'arrive pas à le réaliser vraiment.
Dans nos vies quotidiennes, on n'a pas à réfléchir à tous
nos gestes. Heureusement! On fonctionne au radar et ce radar se guide sur des
repères qui sont là depuis des années. J'entends par repères, la visite de nos
proches, la bière au bar, les câlins, les poignées de main, etc.
Les poignées de main! Celles-là mêmes qui font passer le
courant d'une personne à l'autre. Qui sont si importantes pour moi. Qui m'insultent
quand elles ne s'accompagnent pas d'un échange visuel. La poignée de main et
l'échange visuel qui créent un moment exclusif, semeur de confiance, d'échange
sincère.
Le contact.
C'est ça qui me manque le plus. Il manque cette clé qui met
le contact et démarre ce moteur qui, ces temps-ci, a de la misère à se laisser
convaincre de « partir »...
Pis vous, ça va?
Clin d'œil de la semaine
Des fois, j'ai hâte de recommencer à chialer un peu : « Y
a ben trop de monde ici, on s'en va! »