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  CHRONIQUEURS / Deux mots à vous dire

Bienvenue au Québec

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On est de même. Il faut bien l'admettre...

Débattre d'un projet, c'est-à-dire argumenter, réfléchir à un point de vue et l'exprimer calmement, on ne sait pas trop comment faire ça.

Prenez les frais de scolarité. On n'a pas fait le débat. Le gouvernement Charest a réussi à coller au carré rouge l'image de l'être médiocre et violent alors que le vert était investi de tous les bienfaits. Assez réducteur, mais bien efficace quand on ne veut pas débattre d'une question. Notez au passage que le problème des frais de scolarité pourrait rebondir à tout moment. L'important n'était pas de régler le problème, c'était de se rendre à la prochaine élection. Ou, mieux, d'acheter la paix pendant quelques mois, misant ainsi sur notre mémoire collective défaillante.

Que l'objectif soit électoraliste ou non, la Charte des valeurs proposée par le Gouvernement Marois a, donc, le mérite d'imposer un exercice qui est aussi nouveau que salutaire.

J'ai vu, lu et entendu toutes sortes de choses. Et c'est bien ainsi. De la honte avouée d'avoir voté pour un parti xénophobe jusqu'à l'appui inconditionnel pour le projet, tout continue de se dire. Mais souvent, la base n'est qu'émotive.

Bien peu de celles et ceux qui commentent ont téléchargé la Charte pour la lire. Pourquoi le faire quand deux ou trois lignes choisies par mon média préféré suffisent à ce que je me fasse une idée globale, totale et non négociable?

On est de même. Il faut bien se l'admettre...

Émotifs jusqu'à l'os, et tellement plus habile dans le rôle du gérant d'estrade que dans celui du proposeur d'idées et de concepts!

J'écoute Philippe Couillard qui s'insurge, haut et fort. Et je me souviens que son parti avait choisi la voie d'évitement avec la Commission Bouchard-Taylor. Pas mauvais comme commission, dois-je dire. Et juste assez longue pour nous endormir collectivement, permettant aux Libéraux de s'en tirer sans proposer de règlement. Il est toujours plus simple d'être dans l'opposition, de toute évidence. Celui qui prétendait être celui qui ferait de la politique autrement suit les traces des anciens comme un bon soldat.

J'ai lu le projet de charte.

Tout ne me plaît pas. Mais, pour moi, un fait demeure : pour unir toutes ces croyances dans un espace public commun et respectueux, il faut un livre de règlements.

La charte est une base de discussion fort intéressante.

Je continue de croire que la religion est une chose personnelle. Nous sommes près de huit millions de personnes à vivre ensemble, au Québec. Chacun a le droit de vivre avec des convictions personnelles. Mais, tôt ou tard, dans l'espace collectif qui doit nous unir, il faudra s'entendre sur les façons de faire.

Deux réflexions se confrontent dans ma tête sur ce sujet :

  • J'ai à travailler avec plusieurs communautés culturelles et, franchement, je trouve enrichissant de les côtoyer, autant que je trouve fascinant de chercher à comprendre ce qui nous différencie culturellement. Je tiens pour acquis que ce nous comprenons nous fait moins peur et que, pour comprendre, il faut s'informer. Je suis aussi convaincu que la meilleure façon de s'informer est d'entrer en contact avec des gens qui agissent, se vêtissent et vivent de façon un peu différente. Les tabous tombent généralement assez vite.

  • J'ai aussi la conviction que ce que nos actions, notre façon d'être, notre habillement, tout ça, ça envoie un message. Je prends un exemple simple. Si, dans le cadre de mon travail, je rencontre des gens alors que je porte un complet, chemise, cravate, je n'envoie pas le même message qui si je suis en bermudas et gougounes. L'exemple est simpliste, mais l'image parle. Foncièrement, je suis pourtant la même personne, avec les mêmes compétences, les mêmes qualités et les mêmes défauts et ce, que je sois habillé de la façon que je voudrai bien m'habiller. Mais le message que j'envoie et, par conséquent, le message qui est reçu par mon interlocuteur, lui, est différent. Et ça, ça me turlupine un peu.

C'est un peu là que j'en suis.

L'espace public, pour moi, doit être laïc. Le crucifix, à l'Assemblée nationale, doit partir. Le message qu'il envoie est que le dieu chrétien guide les travaux des élus. L'Assemblée nationale devrait être au-dessus de cette mêlée.

Pour illustrer avec un autre exemple, je pense à la prière qui précède les séances de travail à ville de Saguenay. En lieu et place, je proposerais ceci : avant le début des travaux, j'attirerais l'attention de tous sur les valeurs qui doivent nous guider : démocratie, équité, transparence et solidarité. Et je vérifierais, au fil des décisions prises, que chacune de celles-ci soit en lien avec ces valeurs. Ce serait plus payant et universel qu'un Notre Père...

C'est un peu là où j'en suis pour le moment, disais-je. Mais j'accepte d'entendre et d'apprécier tout argument servi correctement. Correctement, ça veut dire que des arguments sont servis en lieu et place de la petite phrase assassine sur les médias sociaux.

____________

Prenons la charte pour ce qu'elle est : un projet qui a à être discuté et modifié au besoin et qui a le mérite minimal d'offrir une première plateforme de discussion. L'autre mérite qu'a ce texte, c'est celui de nécessiter une implication de chacun dans le fait d'énoncer son idée.

Traiter le gouvernement de ci et de ça ne réglera rien. Et rien, c'est exactement ce qui a été fait dans tout le dossier des accommodements raisonnables. Les problèmes ne sont pas disparus, pourtant. Comme un feu, ils couvent dans l'entretoit de la demeure. Un de ces quatre, les flammes vont réapparaître.

Et là, on dira : « Le gouvernement n'a rien fait... »

Là, il a le mérite d'avoir initié quelque chose. Notre responsabilité est de s'informer à plusieurs sources, de lire la charte et ses motivations pour, ensuite, exiger de nos élus qu'ils se mouillent.

Je crois sincèrement qu'on a plus à gagner qu'à perdre à vivre dans un monde multiculturel.

Mais il nous reste des repères à bâtir.

Il nous reste des débats à faire.

Il nous reste, en fait, à sortir de notre rôle de gérant d'estrade et à proposer des solutions.

Clin d'œil de la semaine

« Mon Dieu, que c'est compliqué. » Oups....


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