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  CHRONIQUEURS / Deux mots à vous dire

Le deal du barbecue

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Photo : Consommation, responsabilité, prise en charge... Dois-je déployer des efforts pour me débarrasser de mes objets encombrants et devenus inutiles? - François Fouquet
François Fouquet Par François Fouquet
Lundi le 9 juillet 2018      

Je préparais un exposé sur le modèle d'affaires coopératif à être présenté à des étudiants de l'Université de Sherbrooke. Une sorte de mélange conférence-cours qui cherche à démontrer comment, dans le quotidien, un modèle d'affaires peut être aidant et utile pour sa communauté.

Dans la liste des valeurs coopératives, il y a celle-ci: la responsabilité. Dit autrement, la prise en charge.
Et je me suis arrêté un moment. Dans ma tête, les éléments se bousculaient.

D'abord, parmi les valeurs coopératives, la prise en charge/responsabilité est probablement une des plus importantes. Elle est la base de l'action. Une coopérative ne naît pas si, à la base, des personnes ne décident pas de se prendre en charge pour créer un modèle économique répondant à un besoin. Et tout au long de la vie d'une coopérative, les membres demeureront impliqués. Ils auront constamment à se prendre en charge.

En même temps que le concept de prise en charge déambulait dans mes pensées, je repensais à cette manchette publiée autour du 1er juillet et qui mettait en lumière le fait que trop de gens se servent d'organismes communautaires comme Estrie-Aide pour se débarrasser de ce qu'ils ne veulent plus.

Comprenez-moi, c'est bien d'y penser. Je veux dire d'offrir à un organisme un bien pour aider quelqu'un d'autre. C'est un geste responsable. Mais je dis bien offrir. Pas passer avec une remorque et tout laisser sans se demander si l'organisme peut en faire bénéficier autrui.

C'est d'ailleurs ce que l'organisme déplorait. Il doit déployer des ressources assez extraordinaires pour reclasser des tas de débris et les acheminer, en bonne partie, à l'Écocentre.

C'est sûr que c'est plus simple de pouvoir passer au quai d'Estrie-Aide, en soirée, et tout « domper ». Mais c'est aussi de mettre ses cochonneries dans la cour d'un autre. Moins responsable, soudainement. Surtout qu'on camoufle le tout sous le couvert du geste de générosité.

Consommation, responsabilité, prise en charge... Dois-je déployer des efforts pour me débarrasser de mes objets encombrants et devenus inutiles? Me semble qu'avec toutes les taxes que je paie, la « ville » devrait s'en occuper, non?
Ça me chicote toujours cette notion de déresponsabilisation par rapport à ce qu'on possède.

Et là, j'imaginais la scène suivante; il y a dix ans, Jacques est allé dans une quincaillerie à grande surface. À l'entrée, il y avait cette bête de métal : un barbecue. Mais là, monsieur, madame, un gros barbecue! Un « démo » qu'il fallait prendre tel quel et maintenant pour bénéficier du rabais. Sur place, une main sur la bête pour en réserver l'exclusivité, Jacques multiplie les téléphones. Il lui faut trouver, là, maintenant, un ami qui a un « pick-up » ou un « trailer ». Jacques en trouve un et offre même le souper au gars pour le dédommager!

Vous dire la montée d'adrénaline ressentie quand le coup a réussi! Wow! Et quel « deal »!

Dix ans plus tard, le barbecue commence à être défraîchi. Jacques rêve d'une nouvelle bête! Cette fois, pourtant, il ne fait aucun effort pour se débarrasser de la bête usée. Pas de téléphone pour trouver quelqu'un qui a un "pick-up" ou un "trailer". "The thrill is gone", dit la chanson... Pire, il s'attend à ce que quelqu'un s'en occupe à sa place. Après tout, il paie des taxes, non?

Jacques est furieux : " Estrie-Aide et l'Armée du Salut ne veulent pas venir chercher le barbecue parce que ça ne correspond pas aux besoins à combler.... Pffff... Puis, quand on pense que c'est rendu que les pauvres lèvent le nez sur du stock donné! Quand c'est rendu que les pauvres veulent choisir !!!», grogne-t-il, aveuglé par la colère et la mauvaise foi.

La prise en charge. La responsabilisation. Deux concepts difficiles à gober pour un enfant trop gâté...

Clin d'œil de la semaine

Entendu pour vrai : « Qu'essé, y ont pas d'argent! Qu'y fassent comme moi, qu'y empruntent! » ...


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